[Tp Moldu] Selene Sweevil et Seth Cullen

Des goûts, il n'en avait pas. Seth pensait qu'il ne serait pas dans l'humour de son nouveau binôme de proposer une recette à base de sang frais. Il la dévisagea pendant que, dans sa tête, il répondait ironiquement à sa question avant d'en concevoir une moins gore.

La jeune fille avait l'étrange capacité de passer de l'hippogriffe au sombral sans délai ni réflexion. Ceci n'ennuya pas le Serdaigle qui vit là une manière d'éviter de s'étaler sur ses origines. La question était de politesse, il avait un certain mépris pour les civilités basiques. "Qui es-tu ? D'où viens-tu ? Qu'est-ce que tu écoutes comme musique ?" Il évitait du mieux qu'il pouvait de participer à ce type d'échange. En quoi cela peut-il bien l'avancer de savoir que je viens de Carlisle, pensa-t-il étonné. Personne ne sait le placer sur une carte de toute façon.

De même qu'il ne s'intéressait pas aux origines de Selene. Il n'arriverait pas à faire semblant de s'intéresser au bavardage. Seth aimait la réflexion et la culture, entre autres choses. La géographie ne faisait pas partie de ses lubies.

Il fit semblant de réfléchir après ses prises de paroles, regardant alentour ce qu'il se passait pour les autres. Des discussions ça et là s'élevaient bredouillantes sur les choix gastronomiques avec un enthousiasme circonspect. Quand il eut bien fini de faire semblant de réfléchir, il reporta son attention sur Selene et hocha simplement la tête.

- D'accord, au chocolat, accepta-t-il.

Cela ne lui était sans aucune forme d'importance mais il souhaitait que son binôme prenne plus de plaisir que lui à l'élaboration d'une recette. Seth, de son côté, serait un commis de cuisine discret mais dévoué.

Il rangea ses affaires pour libérer l'espace des tables. Il fallait trouver des ingrédients et pour un gâteau au chocolat, le seul dont il était certain était... le chocolat. Que connaissait-il comme gâteau ? Sa mère cuisinait souvent des brownies. Sa culture gastronomique s'en arrêtait là. Avec peu d'assurance, un sourcil élevé et un sourire sans défaut, il demanda:

- Heu... brownie ?

En espérant qu'elle ait plus d'imagination que lui.

Seth jeta un coup d’œil faussement expert sur la formule du gâteau - il appelait ça "une formule", déformation Serdaigle qui pense que tout mélange est une potion. Il traitait ainsi la cuisine. Ce n’était qu’un cours de potion magique avec des ingrédients peut-être plus savoureux. Pourtant Seth aimait le parfum de naphtaline, du camphre, du souffre, des huiles de dragon ou des poudres de corne de licorne. Chacun de ces ingrédients étaient pour le moins immangeables.

Il hocha la tête et chercha partout un four. Y avait-il un four dans la classe ? Il fronça les yeux et laissa à Mademoiselle Le Chef Cuistot le soin de se poser la question le moment venu. Loin de lui d’apposer une résistance à la bonne volonté. Le professeur Joketier devait avoir prévu quelque chose pour les cuissons.

Les odeurs des différents aliments commençaient à lui monter au nez.
Les œufs brisés, le lait, les fruits séchés, le chocolat, les farines, les citrouilles, les ingrédients battus. Le mælstrom d’odeurs, en plus de celle corporelle de chaque élève, lui tournerait bientôt la tête. Il lui faudrait beaucoup de concentration pour résister à l’envie de se boucher les narines.

Ses sourcils se froncèrent légèrement et il boucha sa respiration.
Respiration par la bouche en attendant de s’accommoder au bouleversement sensoriel.

- Je beurre. Je crois que je ne mets pas la préparation en danger en commençant par ça.

Le Serdaigle se précipita vers une table qui proposait divers ingrédients et ustensiles et prit tout ce que la liste proposait. Il les rapporta près de Selene et la regarda pesamment afin qu’elle donne son aval pour débuter.

Seth enfila le tablier de mauvaise grâce. Il se sentait parfaitement ridicule. Il aurait préféré se salir en prétendant avoir été un bon commis plutôt que de ressembler à une ménagère de moins de vingt-cinq ans, fée du logis et bonne mère de famille. Mais, pour ne pas vexer la bonne intention de Selene, il le passa sans se plaindre.

Le Serdaigle beurra le fond du plat qu’il n’avait pas mesuré mais qui devait approximativement faire vingt centimètres de côtés. Il trouva que les mages ou les moldus qui avaient crées une telle formule étaient de cruels maniaques ou des obsessionnels du double-décimètre. Est-ce que tout le monde était censé avoir un tel plat chez soi pour prétendre faire un misérable gâteau au chocolat ? Sa mère avait-elle un moule à gâteau de vingt centimètre de côté ? Et, quand bien même elle n’en aurait pas eu, cela lui interdisait-il de cuisiner des brownies ? Devait-on réellement penser à acheter un moule de cette dimension lorsqu’on s’installait dans sa nouvelle cuisine et qu’on l’équipait du matériel nécessaire... ?

C’est en maugréant silencieusement, qu’il ajouta de la farine. Il eut la main légère et pour retirer l’excédent, il profita de quelques secondes d’inattention de Selene pour utiliser la magie. Le surplus fut retiré. Il lui lut la suite comme elle l’avait demandé.

- Ensuite, nous devons « ajouter un oeuf, mélanger, puis ajouter la farine » quoi ?! s’exclama-t-il, encore de la farine ? Je viens d'en foutre partout, déjà... mais bon... il en faut encore visiblement. Puis « ajouter le deuxième oeuf et mélanger de nouveau. »

Seth repoussa le plat beurré et jeta un coup d’œil à la préparation de Selene. Intrigué, il demanda:

- Je suppose que c’est dans ton récipient qu’on doit ajouter les œufs et les ingrédients ? Je veux bien le faire mais tu moulines. Ensuite, tu me diras où nous devons trouver un « micro-onde » dans Poudlard... je suis très curieux de le découvrir.

HJ: tu as raison, c’est trop ennuyeux de faire un gâteau. Je propose de faire une ellipse. En outre, je crois qu'un message annonce parle un petit peu de toi...

La cuisine allait doucement mais sûrement. Ils étaient parvenus à la fin de la recette et Seth avait réalisé au cours de la réalisation des brownies que son odorat pouvait lui servir à équilibrer les ingrédients à l’instinct.

Avec une spatule propre afin de ne pas la toucher directement, il avait même écarté la main de Selene qui, suivant le dosage proposé, aurait mis trop de sucre. Il était certain qu’un peu moins de sucre ne serait pas une mauvaise chose puisque le chocolat blanc qu’ils utilisaient en contenait déjà beaucoup. Pour la noix de coco aussi, il proposa de doser lui-même. Il inventa aussi l'ajout de trois gouttes de fleur d'oranger pour créer la persistance d'une saveur sur le palais.

Il n’expliqua pas ce qui lui fit penser que ce dosage serait le meilleur mais il fit tout pour obtenir gain de cause.

Après avoir enfourné le moule où reposait l’onctueuse pâte, ils regagnèrent leur plan de travail. Le Serdaigle n’attendit pas une minute de plus pour retirer son tablier et le poser sur son dossier de chaise. De sortilèges en sortilèges, il récura les ustensiles, la farine éparse sur la table et les plats souillés.

Durant qu’il s’effectuait, il conversait plus volontiers avec Selene. Il lui avait déjà expliqué un peu plus tôt que ses parents et sa famille était effectivement des férus d’histoire et de civilisation. Il lui raconta en quelques phrases bien choisies pour n’en dire pas plus sur lui-même que Selene ne l’avait demandé, que c’était un point commun qu’il avait avec ses parents et grands-parents.

Ils avaient une trentaine de minutes à brûler pendant que le gâteau chauffait. Délesté de ses tâches ouvrières, le jeune Cullen se sentait plus à même d’engager la discussion. Toutefois, il fut incapable de trouver une question à lui poser et dont la réponse l’intéressait réellement. Comme trop souvent, Seth se montra franc:

- Tu sais, Selene, je déteste bavarder pour ne rien dire. J’écoute beaucoup mais je suis incapable de faire semblant de m’intéresser à la vie des autres. Cela ne vient pas de toi, c’est ainsi pour tout le monde...

Ou presque, rectifia-t-il pour lui-même quand un flash du visage d’Eden traversa sa mémoire.

- Je peux répondre à toutes tes questions mais il me sera toujours difficile de te les retourner avec la même générosité. J’ai toujours eu l’impression que ma façon de penser ou ce qui m’intéressait vraiment était trop singulier pour être partagé.

Seth trouva la Serpentard plutôt pavé de fiente. Faute avouée à moitié pardonnée, il ne se sentit plus l’obligation de soutenir une discussion dont il n’éprouvait pas l’envie.

Sa tête était remplie de carrioles entières de problèmes. Le drapeau noir était levé sur son embarcation. Malheureusement pour ses relations sociales ce n’était pas encore aujourd’hui qu’elles viendraient à l’abordage de ses journées. Il se pavé de fiente du peu qu’il avait déjà, ne cherchant pas à élaborer ses pavé de fiente ou de nouvelles pavé de fiente.

En outre, il n’était pas assez hypocrite pour enjoliver son attitude et s’inventer une extravagance qui l’écoeurerait. S’en sentait-il fautif ? Pas le moins du monde. Et comme Selene approuvait aimablement, aucun sentiment de culpabilité ne vint troubler le silence bienveillant qui s’en suivit.

Ils échangèrent toutefois quelques paroles et pensées sur le fameux moule. Seth se défendit de faire exprès de ne pas penser ordinairement. Il ne pouvait bien sûr pas expliquer qu’être menacé de devenir un vampire changeait sensiblement son point de vue sur la vie mais il n’éprouva aucune sensiblerie à lui parler de sa gêne quant au pavé de fiente physique.

- Le moule et la conformité ne font pas peur et je ne les repousse pas. Je crois plutôt que ce sont eux qui ne s’intéressent pas à moi, sourit-il. Pour commencer être effrayé à l’idée du moindre pavé de fiente n’est pas une chose facile. Mais je le vis plutôt bien.

Après une vingtaine de minutes habitées d’autant de silence que de timides discussions, Seth et Selene se levèrent de leur place pour aller vérifier la cuisson. Le Serdaigle laissa au chef le soin de sortir la préparation du four. Il sépara l’odeur agréable qu’il dégageait des quelques effluves ou ratés des autres fours.

De retour à leur plan de travail. Selene goûta. Seth ne prit qu’une bouchée par politesse et il goûta moins qu’il ne sentit.

Le visage de la Serpentard afficha un sourire enchanté. Le Serdaigle fit pavé de fiente à ses papilles et lui rendit son sourire. Il se pavé de fiente de découper deux petites parts qu’il entoura chacune d’une serviette blanche. Une certaine personne se ferait une joie d’en manger à sa place. Quant à la pavé de fiente part, il la déposa sur le bureau du professeur Joketier.

- Bon appétit, mademoiselle.

Avec la même obligeance solennelle qui les avait accompagné tout au long du TP, Selene et Seth se séparèrent et se remercièrent l’un et l’autre pour ce travail commun. Autour d’eux, les autres élèves ne tardèrent pas à faire de même. Selene s'en repartit avec ce magnifique plat de 20 cm sur 20...

fin

edit: corrigé les fautes.