Une rencontre empreinte de souvenirs [PV Narrateur][Terminé]

Jeudi 21 Décembre, King's Cross.

* Normalement, il aurait dû arriver à Heathrow s'il était venu en avion. Pourquoi m'avoir donné rendez-vous ici?*

Toujours à se poser des questions. C'était à se demander s'il arrivait à son cerveau de partir en vacances. Après avoir fait les cent pas dans le hall de la célèbre gare, Elinor finit par s'asseoir sur un banc. Elle regarda passer cette foule sans visage, par vagues successives, par grapillons. En cette période de fin d'année, on aurait pu croire que les quais et le hall avaient été parfumés d'une potion de bon sentiments flottant dans l'air, grâce à un pulvérisateur géant. Les gens se sautaient dans les bras, pleuraient, de joie, la plupart du temps, se congratulaient, souriaient. Ils étaient heureux. Elle, elle se retrouvait spectatrice, presque voyeuse, une sale impression de culpabilité.

Il y avait assez longtemps qu'elle avait fait le deuil de tout bon sentiment familial, et prétendait haïr la mièvrerieque pouvait entraîner ses effusions. Cependant, elle avait déjà connu cette chaleur. Celle de ses Noël passés avec Margareth et son père, à chanter quelques traditionnelles ritournelles au pied du sapin. Même si son père était déjà atteint de sa maladie. Il avait quelques fois dans son regard une once de fierté lorsqu'il regardait sa fille grandir devant son arbre. Et ça vallait tous les cadeaux de Noêl pour la jeune fille. Le bonheur est pareil à cette maladie infantile boutouneuse, il en reste toujours des traces indélébiles.

Ses rares souvenirs réchauffaient son corps dans cet endroit devenu hostile. Elle ferma les yeux. Des tintements. On pouvait entendre les clochettes des pères Noëls de l'extérieur, ou bien le Jingle bells d'une chorale qui déambulait sur le trottoir. Des bruits de pas: lents, pressés, stressés, inquiets... Elle secoua la tête, ce qui la focalisa sur ses impressions olfactives. Des parfums tout d'abord. Ils défilaient dans ses narines de manière aléatoire, eu gré du flux des passager qui rejoignaient les leurs. Rares ou bon marché, tous se mêlaient jusqu'à ce qu'une odeur de marrons grillés prennent leur place.

C'était long, cette attente était insupportable pour Elinor qui commença à se demander si son grand-père ne s'employait pas déjà à lui gâcher ses vacances.

Boom!

Un bruit insolite tira le signal d'alarme dans sa tête. ses yeux s'ouvrirent immédiatement. Elle rigola franchement. Le début du bonheur inhérent à chaque personne présente dans le hall?

Un vieil homme venait de pénétrer dans la gare, trois valises sous le bras, il venait de se prendre les pieds dans un vieux parapluie miteux qui s'était échappé de sa main, et s'était étalé par terre. Une de ses valises s'était ouverte et répandue sur le sol. Une collection de noeuds papillons ridicules décoraient le sol de façon artistique.

c'était lui. Elinor se leva sans se presser et attendit qu'il aie tout ramassé lui même avant d'aller le voir.

- Quelle entrée fracassante vieil homme, se moqua-t-elle.

Louis Redgrave.


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Aéroport international de Londres- Heathrow

- Sacrebleu mon ami! Savez-vous que vous venez de comettre un sacrilège? je vous ai dit que je gardais ce sac avec moi, je vieux, mais pas grabataire, enfin pas encore, dit-il souriant de sa voix de velours.

Louis pasa le crochet de son parapluie fétiche sur l'épaule du bagagiste, pour l'arrêter. Il récupéra le sac au contenu précieux et suivit le jeune homme jusqu'à son taxi.

Une fois bien installé et après avoir donné au chauffeur le nom de sa destination, il soupira et mit sa main dans sa poche intérieure. Il en sortit une photo et deux lettres.



Il passa les doigts sur la photo. Sa belle-fille. Belle, c'était le mot. Lorsqu'il l'avait vue pour la première fois, il se sentit presque jaloux de son fils, comprenant que lui même aurait très bien pu tomber amoureux de cette créature mystérieuse. mais les lois de la nature étant ainsi faites, il s'assit sur son ego. Quelques temps plus tard, il prit Miss Cornfall dans ses bras lorsque son fils lui annonça leur prochain mariage, et la mise en route du premier bébé.

Deux minutes après la prise de cette photo, il s'était conduit comme un parfait idiot et n'avait plus revu son fils depuis. idiot, le mot était faible. Aujourd'hui, il était revenu à Londres pour essayer de reprendre le train en marche, et recoller les morceaux. Il ne savait pas que son fils était malade avant que sa petite ille qu'il n'avait jamais vue ne lui écrivre. Le seconde lettre, d'une soit disant doctoresse, ne l'avait guère rassuré. Le problème, c'est qu'il ne connaissait pas du tout l'hôpital où il était. Suite à la seconde lettre de nature inquiétante, il avait avancé son voyage de trois jours.

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King's Cross

Pourquoi avait-il fallu qu'il lui donne rendez-vous dans cette gare? Il y a toujours du monde et ils auraient sans doute du mal à se reconnaître tous les deux. 21 ans qu'il n'avait pas vu son fils, et jamais Elinor. Si elle ressemblait à son fils, ce serait du sport pour l'apprivoiser.

Il paya sa course et descendit du taxi avec armes et bagages. Son arthrose le faisait souffrir, et il avait du mal à regarder devant lui avec tout ce qu'il portait. Quelqu'un lui tint la porte, il passa, une valise ne put suivre, il fut désequilibré, et Boom

Il commençait à tout ramasser autour de lui et allait se relever lorsqu'il entendit une voix railleuse lui parler.

- Quelle entrée fracassante vieil homme...

- N'est-ce pas très chère. J'ai toujours eu un goût prononcé pour la fantaisie, sans parler de mon sens du spectacle. Tu dois être Elinor. Je suis Louis., dit-il en ramassant ses lunettes cassées.

Il n'avait pas répondu, juste esquivé. Cette attitude contraria en tous points la jeune fille qui était habituée à la provocation et aux joutes verbales. La dernière question de Louis lui permit néanmoins de rebondir de la meilleure des façons.

- Vous me tutoyez? Je ne vous l'ai pas permis. fit-elle froidement.

Son regard changea subitement. Sans s'en rendre compte, elle le testait. A Sainte-Mangouste, Elinor avait souhaité voir en Louis un allié, un roc lui permettant de garder le cap. Cependant, il n'était pas facile de revenir sur 21 de brouille familiale. Il lui fallait des garanties, et les seules qu'elle pourrait obtenir seraient les seules réponses aux questions qu'elle lui poserait.

- Allons ailleurs, il nous faut du calme.

Elinor se mêla des bagages de son grand-père. Elle les tira du mieux qu'elle put vers les toilettes de la gare. Louis la regarda faire d'un air surpris. Il la suivit en lui demandant s'il pouvait l'aider, et ce qu'elle comptait faire dans les toilettes avec ses bagages.

Avec son air avenant habituel, la jeune fille lui répondit par un sympathique:

- Vous verrez si vous suivez.

Une fois tous les deux dans les toilettes, Eli jeta un sortilège de rapetissage aux trois valises qu'elle fourra ensuite dans sa poche. Elle sourit presque de manière ironique à son grand-père qui, à sa grande stupéfaction ne réagit pas comme elle l'espérait.

Vexée, elle l'était, blessée, encore plus. Ce vieux chnoque se révélait imprévisible, agaçant, supérieur. Il commençait déjà à lui taper sur les nerfs.

* Je le savais, c'est un emmerdeur né. Il ne va pas me pourir les vacances, si je peux encore appeler ça comme ça.*

Peu à peu, elle s'isolait à nouveau. Il était loin ce sentiment de bonheur esquissé dans le hall en l'attendant. Elle le maudisait, maudissait son père d'être malade, sa mère d'être morte, et Merlin d'être née. C'était beaucoup pour une jeune fille de seize ans, beaucoup trop.

- Et maintenant, on s'en va.

Elle lui tendit le bras.

* Quelle pugnacité, quel culot, quelle ... têtue. Un chameau serait plus coopérant qu'elle, et moi qui ai passé vingt ans de ma vie dans le désert, je sais de quoi je parle quand ke parle de ces satanées bestioles...*

- Ma chère petite, comme tu l'as gentiment fait remarquer, je suis: vieux et excentrique au point de mettre des noeuds papillons dépareillés avec mes chemises. Je suis fils de tailleur dumou comme vous autres sorciers dite, c'est pour ça que je suis riche, alors ta permission, permets-moi de te dire que je m'assoie dessus.

Elle semblait énervée, tant mieux. Il faut être ferme avec les enfants. Louis lui demanda s'il pouvait aider, mais constata que mademoiselle préférait jouer les wonderwoman. Il la laissa faire heureux de la voir s'épuiser par vanité.

Lorsqu'elle réduisit les valises, Louis aurait presque eu envie d'applaudir, mais il préféra s'abstenir et rester neutre. Il ne voulait pas lui faire ce menu plaisir avant qu'ils ne se connaissent un peu mieux, si elle lui en donnait l'occasion .

- Et maintenant, on s'en va.

- Ah! Je vais transfigurer pour la seconde fois de ma vie! Ja première fois, c'est ta mère qui me l'a montré. C'est assez grisant comme sensation. Allons-y.

Il prit son bras sans rechigner. Il avait détesté transplanner la première fois. Il savait parfaitement qu'on disait transplanner, mais il essaya tant bien que mal de la faire sourire. Veine tentative pensa-t-il, mais quand même.

Flash-Back:

Salle à manger des Redgrave, Carcassonne, France, 21 ans plus tôt.

- Qu'aviez-vous donc à m'annoncer de si important? Je sais déjà que vous allez vous marier, que je vais avoir un petit-fils, qu'y a-t-il de plus pour me faire plaisir? Vous venez vous installer dans le sud de al France près de nous?

- Père, il faut que nous vuos disions quelque chose de très important. Mordred va bientôt naître, etnous voulons être honnête avec vous.

- Qu'y a-t-il bon sang, parle! Il est malade! demanda-t-il inquiet.

- Non, Diane doit vous dire quelque chose sur sa condition.

- Père, vous m'avez très bien acceptée dans votre famille, et je vous en remercie. Vous savez que je n'ai pas eu la chance de connaître le bonheur familial auprès de mes parents. Mais il y a une chose que vous ne savez aps de moi... et qui liera aussi notre fils.

Diane prit une longue inspiration avant de se lancer. Elle prit la main de son mari et croisa les doigts dans les siens.

- Je suis une sorcière.

Louis éclata de rire, la blague étant pour lui si grotesque.

- Et moi je suis la Reine d'Angleterre. Allons, vous ne devriez pas faire tant de frayeurs à un vieil homme.

- Lorsque le bébé sra né, il manifestera ses pouvoirs magiques au bout de quelques jours. je tenais à vous le dire pour...

- Les plaisanteries les plus courtes sont les meilleures mon amie. dit-il goguenard.

Prise d'un accès de fureur devant cette incompréhension qui décidément était le drame de sa vie, Diane lança un sortilège iformulé sur la bibliothèque chérie de son beau-père. Les livres voltigèrent un peu partout, dont son précieux "Raisons et sentiments". Elle prit Louis par le bras et transfigura avec lui dans une prairie du Sussex. A l'arrivée, le vieux moldu vomit par terre, et regarda hébété autour de lui. Diane sortit une miniature de sa poche, qu'elle agranit, un balai! Elle l'enfourcha et partit dans les airs. Vous me croyez maintenant?

Louis prit ses jambes à son cou et courut. Il avait été effrayé. Incompréhension entre les trois, il se débrouilla pour rentrer à Londres, puis, il prit un avion pour Paris, et un qui le ramena à Carcassonne. En rentrant chez lui, sa femme le prit pour un fou quand il lui raconta tout par téléphone. Ils étaient divorcés depuis vingt ans. Il s'emmura dans un silence qui dura 21 ans.

Fin Flash-Back

Louis se rémorait encore l'effroyable dispute qui s'en suivit et qui marqua 21 années de sa vie. Il se demanda si Elinor savait qu'elle avait un frère, et que ce n'était pas le petit bébé aux yeux bleus... Il se demanda ce qu'elle savait tout court. Il se demanda ce qu'aurait été sa vie s'il n'avait pas réagi aussi stupidement... Comme tous les jours depuis 21 ans.

Le grand-père et sa petite fille atterrirent si l'on peut dire devant une sorte de pub. Dans la rue où ils se trouvaient, les gens semblaient tout droit sortis d'haloween, les costumes moins défraîchis. Il sentait la peur le gagner, si c'était ce qu'elle recherchait, elle avait bien réussi son coup...

Le "transfigurer" de Louis décrocha un léger sourire à la Serpentard, qui fit en sorte de rendre le voyage moins pénible. Ils étaient à présent sur le Chemin de Traverse. Il y avait beaucoup de monde en cette période de fête.

Le pauvre Louis ne savait plus où donner de la tête. Tout cela n'était qu'un gigantesque carnaval pour lui. Quelque part, la situation n'amusait pas Elinor tant que ça. Elle aussi quand elle avait découvert ce monde, elle avait eu peur. Heureusement que Maggie avait été avec elle. Et si aujourd'hui, c'était elle qui s'y collait. Ce pauvre homme n'avait rien demandé après tout...

* Non, pas encore, je ne peux pas.*

- Vous allez bien? Vous semblez bizarre. Allons boire un verre, nous irons voir père après.

Louis regagna un peu de calme et pénétra dans le pub avec Elinor. Ils s'installèrent à une table. Elinor remarqua que son grand-père détaillait chaque client avec une grande attention. Elle leur commenda à boire. Louis ne connaissait nullement les boissons sorcières, et en ce moment Tom n'en avait pas. Elle lui prit donc un jus d'oeillet, et se commanda une bièraubeurre.

Il y avait tant de questions qu'elle avait envie de lui poser, mais son naturel borné et sa décision de jouer aux méchantes avec lui l'en empêchaient. La première des choses qu'elle voulait savoir, c'était ourquoi ses parents et lui avaient brusquement cessé de se fréquenter peu avant sa naissance. Logiquement, dans le monde sorcier comme dans le monde moldu, une naissance est un évènement qui rassemble. Alors pourquoi?

Elle ne savait pas quoi dire pour faire la conversation. Ses dents mordillaient sa lèvre inférieure, trahissant ainsi toute sa curiosité, légitime en soi.

Tom leur apporta leurs boissons. Elinor régla l'adition,se disant que Louis ne devait pas avoir de monnaie sorcière. Une fois que le propriétaire du pub partit, elle se contenta de demander timidement:

- Pourquoi?

A présent, assis dans un pub sorcier, tenu par un sorcier, avec une petite-fille sorcière, il buvait une boisson de sorciers qu'elle paya avec de l'argent sorcier. Il y avait de quoi devenir fou, mais pourtant tout était cohérent. Ce monde existait à présent dans la vie de Louis. Ce qu'il s'était efforcé d'oublier depuis tout ce temps avait gagné une existence propre grâce à Elinor.

Pendant qu'on les servit, il la regarda. Les yeux de son père, la grâce et la silouhette de sa mère. Elle ressemblait à la Marche de Radetzky de Strauss. Fière, presque hautaine, mais sûre d'elle. Elle dégageait pour son grand-père une force incommensurable par rapport à la faute qu'il avait commise il y avait si longtemps. Il ne savait pas la multitude problèmes qui la secouaient intérieurement, mais ce qu'elle dégageait était très rassurant pour lui.

- Pourquoi?

Il prit son temps avant de réponse et comprit qu'un gouffre de question les séparait. Il était prêt à répondre à toutes. Celle-ci les résumait toutes. Pourquoi.

* La première question que posent les enfants. Je n'ai pas eu cette chance avec elle. Il faut que je me rattrape maintenant. Je ne lui cacherai rien.*

- Pourquoi n'est-ce pas? Parce que je n'ai été qu'un sombre idiot. Parce que je n'ai pas su être tolérant. Ta mère est morte, ton père, mon fils, est dans un état grave. Elinor je te demande pardon à toi. Vingt-et-un an de silence, c'est trop.

Il but une gorgée de jus d'oeillet, qu'il trouva très bon au demeurant, et poursuivit. Il lui raconta sa rencontre avec sa future belle-fille, et quelques mois après, l'annonce qu'elle était enceinte. La date du mariage fut repoussée à l'accouchement. Peu avant l'accouchement, la dispute, la peur, sa faute. Il lui expliqua tout, dans les moindres détails. Et surtout, Mordred...

- Cela ne fait pas seize comme tu le croyais, mais vingt-et-un ans que nous ne nous parlons plus. Tu as un frère Elinor, Mordred. Il a cinq ans de plus que toi. Pour faire plaisir à mon fils, ta mère a voulu accoucher dans un hôpital moldu...

Les yeux de la jeune fille s'écarquillaient, puis, devenaient suspicieux tour à tour... Elle ne comprenait pas.

- Deux semaines après sa naissance, des hommes déguisés sont entrés dans la première maison de tes parents et l'ont enlevé. Ils habitaient à Londres à l'époque. Je suis au courant car je correspondait secrètement avec ton père à cette époque. ta mère ne le savait pas. Ils en ont été malades tous les deux. Apparemment, ta mère avait contacté les autorités de votre monde, mais ils ne l'ont pas retrouvé. Cependant, elle avait des doutes. Lorsqu'ils ont déménagé à Oxford, je n'ai plus eu de nouvelles. Tu es née cinq ans après, ils m'ont juste envoyé une photo, par politesse. Voilà, tu sais tout. J'aurais voulu revenir en arrière, mais je n'en suis pas capable...

Un monde de certitude cédait du terrain sous ses pieds. Elle ne pouvait pas croire un mot de ce qu'il lui disait. Ce n'était pas possible. Pourquoi ils ne lui avaient rien dit? Pourquoi IL ne lui avait rien dit? Pourquoi elle aurait eu un frère sans le savoir? Pourquoi?

Pendant tout le récit de Louis, Elinor passa par toutes les expressions possibles et imaginables. Cent fois elle vuolut l'interrompre, mais la curiosité de ce qui allait venir après la sommait de s'abstenir. Pourtant...

- Je ne vous crois pas, vous n'êtes qu'un menteur! Vous n'êtes qu'un menteur! Un menteur!

Elle serrait ses poings rageurs sur la table. Elle ne pouvait pas le croire, elle voulait pas le croire. Elle était hors d'elle. Il ne vallait mieux pas qu'il réponde de travers, sinon, il le sentirait passer.

- J'ai une photo que j'ai trouvé dans cette boîte, cet été, c'était moi le bébé! C'était moi! tenez, regardez!

Elle sortit la photo où sur laquelle on voyait un bébé de quinze jours à peu près, ouvrir de petits yeux bleus. Il était cadré de façon à ce qu'on n'en voie que la tête et la moitié du torse. C'était une photo moldue, donc, rien ne bougeait dessus.

Que pourrait-il dire par rapport à cela? C'était ce qu'elle espérait, qu'il soit à cours de mots, et démasqué dans ses mensonges. Il cassait d'elle l'image qu'elle s'était construite de ses parents, qu'elle considérait comme normaux. Son image à lui s'éclairait sous un jour nouveau. Il devenait une sorte de héros miséricordieux, et ça, elle ne pouvait pas le supporter.

Le temps était comme figé entre eux deux. Un silence des westerns spaghettis de Sergio Léone. Harmonica, silence, Harmonica, le duel va commencer...

Louis laissa les photos sur la table et fourra sa main dans l'une de ses poches et en sortit trois photos.

- Très bien, jouons cartes sur table. Voici trois autres prises de la même séries, celles que ton père m'a envoyées. Je te présente Mordred Redgrave, ton frère. Tu es une jeune fille intelligente, si cette photo avait été la tienne, pourquoi aurait-elle eu sa place au grenier?

Sur la photo qu'il avait sortie se trouvait un petit bonhomme. Effectivement, c'était le même que celui du document d'Elinor. Cependant, le bébé nu prit dans son intégralité se trouvait sur une table à langer avec sa mère... Et là, on ne pouvait pas douter qu'il s'agissait d'un garçon.

- Elinor, je sais que ça doit être dur pour toi... Je ne prétends pas tout savoir du chagrin que tu éprouves, loin de là. De mes erreurs j'ai beaucoup appris. Je ne viens pas en ennemis en en pénitence. S'il te plaît donne-moi une chance.

Il avait prononcé cette phrase d'une voix très douce et très posée à la fois. Il était sincère. Il espérait juste que la rancoeur de sa petite fille prenne le pas sur la raison. Bien sûr, il comprendrait si cela arrivait. mais en même temps, il voulait tellement recoller les morceaux avec sa famille...

Inutile de faire un petit tour dans le cerveau d'Elinor en ce moment. Il s'y jouait une tragédie qu'elle n'aurait jamais pu imaginer toute seule. Les idées s'embrouillaient. Les mots se mélangeaient, les souvenirs marquant la moindre petite contradiction de son père dans certaines situations commençaient à faire surface. Une multitude petites anecdotes flottaient à la surface de ses incertitudes. Il lui fallait les repêcher un à un pour qu'ils prennent toute leur signification. Ensuite, les remettre en ordre, quel travail ! De temps en temps un éclaircissement, à d'autres, la confusion. Et lui...

Il était là, planté. Il la psalmodiait en espérant trouver un pardon tardif dans sa bouche.

* Il arrive, il débarque, et paf! Voilà qu'j'te balance tout ça. Dandy tranquille se croyant prophète: espèce de troll! Qu'attend-il de moi? Que je me jette dans ses bras en lui disant tu m'as manqué? *

Perdue dans le dédale de ses sentiments sinueux, étroits et contradictoires, il lui aurait fallu plus que de belles paroles pour éclairer son chemin. Le flambeau de sa colère s'éteignait progressivement pour laisser la place aux ténèbres surprenamment salvatrices. Son cerveau refusa d'aller plus loin et déposa les armes aux pieds de ses émotions.

Elle ne pouvait pas, et arrêta de vouloir contester sa version des faits.Elle se laissa aller et pleura un bon coup. On ne lui avait jamais parlé de son frère. Pour être plus exact, c'était la première fois que quelqu'un de sa famille la traitait en adulte responsable. A qui la faute? Sa mère était morte depuis onze ans, Maggie aait fait office de maman pendant cinq ans et s'était comportée comme telle, son père était devenu à moitié fou. Elle était adulte dans sa tête depuis un moment, mais, ce jour là, Elinor sentit qu'elle avait franchi la ligne de démarcation pour de bon.

- Pourquoi n'êtes-vous pas venu plus tôt?

* La pauvre... Avoir déjà ce vécu à cet âge. Et j'y suis pour quelque chose, c'est certain. Je ne me pardonnerai jamais ces erreurs, mais je veux les atténuer. *

- Parce que j'étais lâche et que j'ai eu peur. Il y a quelques années, à carcassonne, chez moi, j'ai rencontré par hasard une sorcière. C'est une très bonne archéologue elle aussi. J'ai appris par hasard que cette bonne dame était sorcière. Lorsque je l'ai su, je lui ai parlé de l'histoire de ta mère. Elle m'a certifié que de la façon dont l'a retrouvée ton père, elle avait été assasinée. J'ai eu peur.

Louis, prit les mains d'Elinor dans les siennes.

- Lorsque j'ai dit le nom de jeune fille de ta mère à cette dame, elle a eu peur et moi aussi...

Le vieil homme raconta en détail à sa petite-file comment il avait appris que les parents de Diane étaient des mages noirs, et réputés de surcroît. Cette fois, la jeune fille était fixée.

Il ne lui restait plus qu'à rattraper le passé, vivre dans le présent pour se créer un avenir. Elle venait de se découvrir un grand-père, lâche, excentrique, mais bel et bien vivant, et avide de la découvrir et de l'aider. Il venait même d'apparaître un frère! Même s'il était absent...

- Elinor, quoi que tu décides, je t'aiderai. Peut-on aller voir ton père s'il te plaît?

La suite ...